Pourquoi on pleure, l'enterrement de quelqu'un qu'on ne conna t pas bien ? Peut- tre parce que, comme pour Georges Marchais, c'est la fin d'un monde qu'on ensevelit, et avec lui tant de vies g ch es et de r ves bris s sur lesquels les militants se retournent, ce matin de janvier 1996, dans le froid. On pleure aussi quand devant vous on enterre un demi-si cle de cin ma ou litt rature, et que le chagrin prend alors les couleurs de la nostalgie. On pleure de voir pleurer et la femme qui aimait G rard Brach, le sc nariste qui ne s'aimait pas.
Il y a des enterrements rat s, mais - chut - il ne faut pas le dire. C'est le genre qui veut a: dans les colonnes des journaux, les chroniques mortuaires sont toujours plus douces que les portraits des vivants. Il y a des enterrements qui ne sont jamais finis, quand les cendres restent dans la th i re, sur la table de la cuisine de Catherine Robbe-Grillet. Il y a des enterrements o l'on rentre autant sa col re que ses larmes, parce que c'est trop injuste, cette c r monie sans Pr sident, sans d put s, sans ministres, alors que Maurice Kriegel-Valrimont, l'homme qui g t l sous le drapeau tricolore, a lib r Paris. Quand on voit toutes ces rosettes dont on couvre l' lys e ces gens qui n'ont rien fait
Souvent plus gaies qu'un pot de d part (ces nouveaux enterrements des temps de crise), les fun railles sont parfois aussi scandaleuses que sous l'Ancien R gime: chaque semaine on enterre dans l'ancien carr des indigents de Thiais des hommes sans nom. Les enterrements ferment la parenth se d'un si cle, celui d'un dernier nabab corse dans une le qui se meure, mais auscultent aussi les valeurs de celui qui s'annonce.
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